Du courage et de l’appétit

Prise en étau par la brutalité de Donald Trump et le cynisme mortifère de Vladimir Poutine, l'Europe brille aujourd'hui par sa lâcheté et son incapacité à tenir tête aux deux grands. Si elle veut s'émanciper, elle devra faire de courage. A quel prix ?

Etre humilié est une chose. Etre faible en est une autre. Les deux, aussi inconfortables qu'ils puissent être ne sont finalement pas répréhensibles. La première relève du peu d'intelligence et de délicatesse de celui qui administre cette humiliation ; la seconde, relève du jugement de valeur et se révèle finalement des plus relatives.


La Course à L’échalote


L'Europe a connu, depuis l'accession de Donald Trump à la Maison Blanche les deux sentiments, tout comme elle les a connus avec le déclenchement de la guerre en Ukraine en février 2022. Mais ce qui s'avère des plus dérangeants et des plus inquiétants, c'est la lâcheté sous-jacente ou clairement étalée de l'Europe face aux Etats-Unis de Donald Trump et la Russie de Vladimir Poutine. Lâche car incapable de tenir tête à un président nouvellement élu et qui agite la menace sécuritaire et économique comme une arme de destruction massive.

Coquille vide et Droits de l'Homme

Constat identique face au président russe auquel l'Europe, et la France en particulier, continue à acheter du gaz au pays dont il gère les destinées. D'aucuns, à raison ou pas, s'écrieront, que l'Europe n'a aucun moyen de contrarier les velléités de l'un ou de l'autre, que la puissance du premier s'allie au cynisme du second, l'Europe bafouée préférant se réfugier timidement, penaude, derrière des traités d'alliance, dont celui de l'OTAN, devenu pour ce dernier une coquille vide depuis que le vice-président J.D Vance a déclaré que l'Europe devait apprendre à se défendre seule.


Le Calice Jusqu’à la lie


Alors passé le constat, pourquoi ne pas voir dans la volonté de Trump et Poutine d'éteindre la voix de l'Europe, l'opportunité de réinventer un continent qui dispose d'atouts et non des moindre. Sans en faire la liste complète, il serait de bon ton que le Vieux Continent fasse valoir sa majorité politique, diplomatique et militaire. Car elle en a les moyens sauf à vouloir devenir les vassaux silencieux de deux despotes en puissance dont l'objectif final n'est en rien l'intérêt général mais leurs intérêts propres baignés d'un populisme brutal, arrogant et condescendant.

A force de brandir l'étendard d'un humanisme bienveillant, d'un atlantisme bercé d'illusions et de Droits de l'Homme incapables de contenir les pulsions destructrices de certains, l'Europe et l'Union européenne ont laissé passer le train des bouleversements géopolitiques en cours depuis déjà plusieurs années.


Rideau de fer et Zone Tampon


Sécurité et Dissuasion

Convaincu de la fraternité des Etats-Unis, du pragmatisme poutinien, l'Europe s'est laissée abuser tout en se mentant à elle-même par facilité. Au pied du mur, elle doit désormais s'assumer quitte à froisser ou irriter le duo Trump - Poutine qui œuvre contre elle, la tâche étant rendue des plus faciles par l'absence d'actes et de réactions capables de freiner les deux grands.

En abandonnant sa sécurité aux Etats-Unis, en désertant le champ diplomatique, en tergiversant sur l'aide en l'Ukraine (ouvrant ainsi la vie à la réaction de Donald Trump que à laquelle on a assisté dans le Bureau Ovale), l'Europe a perdu toute forme de crédibilité ce qui est peut-être encore pire que la lâcheté dont elle fait preuve.


La Diplomatie du Risque


Et d'aucuns d'avancer la question de la dissuasion nucléaire confiée à la France et au Royaume-Uni. Là encore la question ne laisse pas sans interroger : quels moyens matériels déployer, où en Europe, qui le financerait et dans quelle limites budgétaires ?

Devenir indépendant à un coût et pas seulement  militaire car celui-ci est nécessairement servi par des obligations économiques qui pourraient rencontrer l'hostilité des peuples. Partant de la doctrine Si vis pacem para bellum, le Vieux Continent prend aussi le risque de braquer la Russie voire les Etats-Unis de Donald Trump qui entend vassaliser l'Europe, tout comme l'Ukraine, et non pas la voir s'émanciper en totalité. Car in fine, il s'agit bien d'une question de courage. Celui de tenir tête à deux pays à l'appétit, non pas insatiable mais certain. A l'Europe de montrer que le frigidaire n'est plus ouvert.

 

Bio: Olivier Longhi possède une vaste expérience en histoire européenne. Journaliste chevronné avec quinze ans d'expérience, il est actuellement professeur d'histoire et de géographie à la région de Toulouse en France. Il a occupé divers postes dans le domaine de l'édition, notamment ceux de chef d'agence et de chef de l'édition. Journaliste, blogueur reconnu, éditorialiste et chef de projet éditorial, il a formé et dirigé des équipes éditoriales, a travaillé comme journaliste pour différentes stations de radio locales, consultant en presse et en édition et consultant en communication.

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